10 août 2022 - Interview de Jessica Chambet Rosset

- Responsable évènements et médias -

« Pour moi le plus grand apport de la pédagogie ça a été l’ouverture d’esprit. »

Une pédagogie de la liberté

« Développer son imagination, son imaginaire, fait partie de cette pédagogie.  Et donc on nous incite à la libre pensée, à ne pas être des moutons. »

Qu’est-ce que la pédagogie Steiner-Waldorf vous apporte dans votre quotidien professionnel ?

« Dans mon travail au quotidien, je conseille des marques dans leur stratégie de communication.  Ne serait-ce que dans la réflexion stratégique en amont, de compréhension d’une demande, ou même d’un état des lieux, d’une situation en fait, c’est d’avoir toujours un intérêt de se positionner avec différents angles.  C’est-à-dire de ne pas partir bille en tête sur la chose la plus commune, mais de se mettre à la place des autres et d’avoir toujours un pas de côté, une vision différente, donc de pouvoir enrichir des réflexions, enrichir des stratégies, et pouvoir proposer vraiment des choses qui sortent de l’ordinaire, qui vont permettre d’émerger et d’avoir un discours différent.

Clairement, si c’est bien un enseignement, c’est que cette pédagogie m’a vraiment aidée en tout cas à me forger une personnalité, à me forger un avis et à avoir des convictions et avoir envie de les défendre.  Au quotidien en effet dans mon travail, c’est ce qui me sert beaucoup et ce qui m’aide à challenger les idées, à être meilleure dans ce que je fais. »

Pensez-vous que l’école Steiner-Waldorf soit en contradiction avec le principe de laïcité ?

« Je trouve qu’au contraire ça développe le principe de laïcité, parce que ça amène cette ouverture d’esprit.  N’étant pas croyante moi-même, mes parents pourtant avait ce cadre plutôt chrétien, je ne me suis jamais sentie soit attirée vers une religion plus qu’une autre ou endoctrinée d’aucune manière que ce soit.  Non, non, au contraire, en fait on nous parlait de tout, c’est-à-dire que j’ai appris aussi bien la Mésopotamie que les principes plutôt chrétiens, que les principes de l’islam.  Enfin au contraire, tout était abordé, sans un biais ou un accent mis plus sur quelque-chose. »

Avez-vous le sentiment d’avoir grandi dans une secte ?

« Pour moi une secte c’est enfermant, c’est donc imposer des principes de pensée et empêcher de penser par soi-même, et c’est l’inverse de ce qu’on nous apprend, de ce que j’ai pu apprendre pendant toute ma scolarité, de la 4ème classe, c’est-à-dire du CM1 classe habituelle, jusqu’à la terminale.

Suite à ma terminale j’ai fait une prépa littéraire.  Je fais une carrière dans la communication où tout se passe très bien.  Je pense que c’est la preuve que l’école Perceval, un n’est pas une secte et qu’on n’enferme pas les enfants, au contraire on les aide à se développer : on leur donne toutes les chances pour réussir dans leur carrière future, et dans leur vie en général. »

Connaissez-vous l’anthroposophie ?

« Au quotidien, c’est-à-dire dans ma scolarité, on ne m’a pas appris l’anthroposophie.  Sincèrement l’anthroposophie moi, voilà…  Mes parents ne sont pas anthroposophes, ils ne l’ont jamais été, et ce n’est pas pour ça qu’ils ont choisi de me mettre à l’école Perceval, et donc qu’ils ont choisi la pédagogie. »

De l’importance de prendre le temps dans la pédagogie Steiner-Waldorf

« On laisse sa chance à chacun, on met beaucoup moins de pression sur les gens, et donc ça permet aussi de pouvoir replacer le curseur sur les choses importantes.  Ma mère a fait le choix de me placer à l’école Perceval malgré toutes les rumeurs fausses qu’on pouvait entendre.  Je pense que j’étais une enfant qui n’avait pas confiance en elle et surtout qui doutait beaucoup, j’avais un an d’avance.  En tout cas on m’avait fait sauter une classe de maternelle si je me souviens bien, et donc j’ai été la plus petite de ma classe en CP, dans une école assez élitiste du Vésinet où je vivais.  Ayant plus de mal à lire et à écrire avec les lettres (moi j’écrivais encore en lettres bâtons), j’avais été un petit peu mise au fond de la classe et je le vivais très mal, cette pression, ce côté « tu ne suis pas le rythme des autres, donc je te mets dans le fond de la classe et puis on verra plus tard ».

ça c’est ma mère qui le raconte puisque j’étais toute petite, comme quoi je pleurais avant d’aller à l’école.  ça ne me ressemblait pas, parce que j’étais plutôt une enfant enjouée, mais qui n’avait plutôt pas confiance en elle dans le travail.  Ma maman est allée à une journée portes ouvertes et elle a eu un coup de cœur pour l’école, elle a rencontré un professeur qui a été mon professeur principal dans mes premières classes.  Donc voilà elle a décidé de m’intégrer à l’école, je me suis totalement épanouie, j’ai adoré. »

Quel souvenir gardez-vous de votre chef d’œuvre ?

« C’était un, de l’organisation, également de la créativité, mais aussi de la volonté, de la conviction pour aller au bout des choses, pour donner le meilleur de moi-même, et aussi de se battre pour quelque chose pour lequel on croit.  Mon chef-d’œuvre c’est donc une exposition photo (je ne faisais pas du tout de photo auparavant), et c’était en fait sur l’étude du corps à travers les âges, plus particulièrement du corps de la femme. 

C’étaient des photos de nu en noir & blanc, que ce soit de jeunes enfants jusqu’à des amies, j’ai photographié mes sœurs, ma mère, et voilà pour moi c’était un vrai challenge : j’ai choisi mes modèles, j’ai fait le set-up et j’ai donc pris les clichés.  Je les ai choisis, je les ai développés moi-même, et donc tout ce processus, avec l’apothéose du chef-d’œuvre, de l’exposition avec les œuvres de tous mes autres camarades, c’est vraiment un souvenir incroyable. »

Avez-vous gardé des liens avec vos camarades de classe ?

« Vraiment l’école Perceval c’était ma deuxième famille, à plusieurs niveaux.  Déjà j’y ai passé énormément de temps en dehors des cours, pour créer des projets, travailler, pour des projets soit personnels soit qu’on avait en groupe avec la classe.  C’étaient comme mes frères et sœurs, d’ailleurs mes deux meilleures amies, à la vie à la mort, je les ai rencontrées dans ma classe à l’école Perceval et on est toujours meilleures amies.  On a nos vies maintenant, on ne vit pas forcément dans le même pays, une à New-York, une à Londres, mais c’est des liens indéfectibles.

Donc ça c’est vraiment le noyau dur, mais c’est-à-dire qu’avec les gens de la classe, on continue de se revoir très souvent, de se donner des nouvelles et même, on s’aperçoit que quand on ne se voit pas « tout le temps »… quand on se revoit c’est comme si on ne s’était jamais quitté.  C’est même difficile d’expliquer le lien, je pense qu’il y a presque un lien fraternel qui se lie.  Dans notre classe c’était très fort, mais je sais que dans les autres classes c’est la même chose : il y a une vraie alchimie entre les élèves qui se crée. »